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« Reportages Passionnés de sport » Le Hip Hop, une thérapie pour Patrick Ranaivo
Originaire de Tananarive à Madagascar, Patrick Ranaivo Ravonison est résident à La Mas Les iris, à Saint-Rémy-de-Provence (13). Installé dans l’unité des Oliviers réservée aux personnes les plus autonomes, il souffre de troubles de la mémoire. Grâce à la danse Hip Hop, il exprime avec son corps des souvenirs lointains.
19 h. Comme tous les vendredis, Patrick Lanaivo, 37 ans, se rend à son cours de Hip Hop à Saint-Rémy-de-Provence. C’est Julie, la professeure de danse, qui vient le chercher à la Mas Les Iris. Ce soir, ils sont huit à s’entraîner. Smurf, Top Rock, Freeze… Après quelques figures en guise d’échauffement, les chorégraphies s’enchaînent. Au milieu des autres élèves, toutes féminines, Patrick est très à l’aise. Au rythme de la musique, il allonge ses bras, s’étire, contracte son buste avant de s’élancer à nouveau… Il utilise la danse comme un langage pour faire parler son corps d’où parviennent parfois à remonter des souvenirs enfouis. Depuis un accident, Patrick a des problèmes de mémoire, notamment la mémoire courte. Une musique, une figure, une parole peuvent faire ressurgir des souvenirs très anciens. Il observe Julie qui exécute un pas de danse. Un regard, et Patrick enchaîne, au centre du cours. Entre Julie et lui, une grande complicité s’est installée, liée à leurs origines : Ils viennent tous deux de Madagascar et échangent en malgache.
La danse dans la peau
Depuis son arrivée à la Mas en 2014, Patrick participe aux activités proposées avec le lycée agricole de Saint-Rémy-de-Provence. « Chaque année, nous réalisons ensemble des performances artistiques, avec la collaboration de Julie », raconte-t-il. C’est ainsi que ses éducateurs ont remarqué que Patrick dansait bien. « C’est une passion chez lui, explique Sylvain Mongrand, chef de service. À chaque fois qu’on danse, Patrick fait du hip hop. » Une discipline qu’il a longtemps pratiquée à Madagascar jusqu’à ce qu’il quitte son pays à 18 ans, après son bac, pour poursuivre des études juridiques en France.
En septembre 2022, soutenu par l’équipe éducative de la Mas, il s’inscrit au club de danse Hip Hop, animé par Julie. La discipline agit comme une thérapie. Grâce à elle, Patrick recompose des fragments de sa vie passée, Par exemple, à l’occasion d’une chorégraphie, il s’est souvenu qu’il avait fait un clip avec ses amis malgaches. « Il est allé rechercher la vidéo sur internet pour nous la montrer », confirme Sylvain Mongrand.
Les JO en ligne de mire
Artiste dans l’âme, Patrick joue aussi de la guitare. « J’en possède deux, une classique et une électrique, ainsi qu’un djembé, explique-t-il. Il m’arrive d’animer les moments festifs à la Mas. »
Il vient de s’inscrire comme bénévole aux JO 2024. Sur le formulaire, il a bien précisé breakdance, la nouvelle discipline très attendue des jeux. « On croise les doigts pour qu’il puisse y jouer un rôle. Dans tous les cas, il sera sur place une dizaine de jours au moment des événements », affirme Sylvain Mongrand.
En attendant, il poursuit ses rituels. Tous les mardis, sa mère, qui habite Marseille, vient déjeuner avec lui et, chaque jour, il écrit ce qu’il s’est passé dans sa journée. Dans sa chambre, les petits carnets de notes s’empilent… Ce sont les gardiens de sa mémoire, au même titre que son corps qui imprime les émotions pour les restituer dans la danse.
Photo : Christian Dao
Texte : Géraldine Dao